Le décollage des fusées au Canada

Le Canada conçoit et opère de nombreuses missions spatiales, souvent en coopération internationale, et développe aussi ses propres capacités de lancement. Choisir un site de lancement adapté exige l’étude de nombreux paramètres (latitude, sécurité, météo, logistique, trajectoires de survol). C’est pourquoi, dans le monde, plusieurs bases se trouvent près de l’équateur, notamment en Guyane à Kourou. Ce guide explique les choix privilégiés pour des lancements depuis le Canada et leurs conséquences opérationnelles.

La latitude et la proximité de l’équateur

Le Canada est situé loin de l’équateur. Pour les orbites géostationnaires (GEO), décoller depuis une latitude équatoriale réduit l’énergie nécessaire et les manœuvres de changement de plan. C’est la raison pour laquelle les satellites commerciaux canadiens à destination de l’orbite géostationnaire sont généralement lancés depuis des pas de tir plus proches de l’équateur, comme la Floride ou Kourou, tandis que les sites canadiens sont particulièrement adaptés aux orbites polaires et héliosynchrones (SSO).

Des satellites géostationnaires

La plupart des satellites de télécommunication géostationnaires doivent rester au‑dessus du même point de l’équateur afin de simplifier la réception (paraboles fixes). Pour des raisons énergétiques et géométriques, il est optimal de lancer ces satellites près de l’équateur, où la période de 24 heures correspond à une altitude d’environ 35 786 km, sans correction d’inclinaison majeure. Les opérateurs canadiens privilégient donc des bases comme Cape Canaveral ou Kourou pour les missions GEO, alors que des sites au Canada visent surtout des orbites utiles à l’observation de la Terre et à la science.

Profiter de l’effet de fronde

La rotation de la Terre offre un « effet de fronde » lors du décollage vers l’Est. Il est maximal à l’équateur (~465 m/s) et diminue avec la latitude. Depuis le Canada, le gain de vitesse est donc moindre qu’à l’équateur, ce qui peut augmenter la quantité de propergol nécessaire pour une mission équatoriale. En revanche, pour des orbites polaires/SSO tirées vers le Nord ou le Sud, ce bonus importe moins, ce qui rend les latitudes canadiennes compétitives pour ces profils.

Fenêtres de lancement et direction du tir

Les tirs vers l’Est bénéficient de la rotation terrestre, tandis que les tirs vers le Nord/Sud permettent d’accéder efficacement aux orbites polaires. Les trajectoires doivent éviter le survol de zones peuplées et respecter les couloirs aériens et maritimes, ce qui explique la préférence pour des bases en bord de mer. Le choix du site canadien conditionne donc la direction de tir, les fenêtres de lancement et la performance globale.

On remarque que de nombreux sites de lancement sont situés à proximité de l’équateur (Kourou, Floride, Sriharikota en Inde, etc.) afin d’offrir un coup de pouce naturel aux véhicules spatiaux et de réduire la consommation de carburant. D’autres bases plus au nord ou au sud (Vandenberg en Californie, Mahia en Nouvelle‑Zélande) sont optimisées pour les orbites polaires. Au Canada, un site côtier en Atlantique, comme le projet de Canso (Nouvelle‑Écosse), s’inscrit dans cette logique.

La proximité avec les côtes

Choisir un emplacement côtier présente plusieurs avantages qui expliquent pourquoi des sites canadiens envisagés pour les fusées se situent en bord de mer.

La zone est isolée des habitations

Les fusées sont des appareils complexes qui pèsent des centaines de tonnes. Les équipes ne sont pas à l’abri d’imprévus au décollage. La prise en compte de toutes les éventualités impose d’isoler le site. Par exemple, en 2003, la navette spatiale Columbia a subi un accident au cours de la mission STS‑107 au‑dessus des États‑Unis. Lorsque le site de lancement est proche des côtes, les débris retombent majoritairement dans l’océan en cas d’anomalie, ce qui minimise le risque pour les populations.

L’accessibilité

Pratiquement tous les sites de lancement au monde sont adjacents à la mer. L’accessibilité de l’emplacement joue aussi un rôle important. Le site doit être accessible par :

  • voie terrestre ;
  • voie aérienne ;
  • et voie maritime.

Certaines contraintes réglementaires et géopolitiques peuvent rendre un emplacement indisponible ou moins pertinent. La planification doit tenir compte des survols maritimes et aériens, de la météo, des exigences de sécurité et des infrastructures de transport. Pour le Canada, des emplacements comme la côte atlantique (Nouvelle‑Écosse) offrent des trajectoires au‑dessus de l’océan, un accès logistique complet et un éloignement des zones densément peuplées, ce qui en fait des candidats naturels pour de futurs pas de tir.